Périple en Franche Comté – été 2008. Première partie : départ et premières surprises…

Depuis bien longtemps nous rêvions Nico et moi-même de tremper nos lignes à mouche dans les rivières calcaires de la Franche-Comté, berceau de la pêche à la mouche en France. De la mythique Loue en passant par le Doubs frontière, puis l'Ain (La Haute et la Basse) et ses affluents. Nico est mon ami d'enfance et de pêche depuis toujours, et c'est ensemble qu'on a vécu la plupart des moments qui font qu'on est véritablement accro. Les joies, les déceptions, les coups du soir dans le soleil couchant, les nuits à la fraîche en écoutant les gobages sonores de grands poissons, les grosses prises et les bredouilles, les coups de froid et les discussions interminables de l'hiver, autour d'une bière bon marché, en revenant souvent à cette idée de voyage dans le Doubs et le Jura, en imaginant mille fois ce coup de pêche qui nous rapporterai une truite sauvage zébrée, près de la bordure, vous savez, sous l'arbre et derrière le rocher, à la limite du courant…

 

 

 

Après avoir blindé ma voiture – heureusement dépourvue de sièges à l'arrière – d'affaires de pêche, d'une tente, du matériel de camping et autres diverses choses dont j'aurai besoin plus tard dans l'été en Bretagne, et vérifié maintes fois s'il ne nous manquait rien, nous sommes partis à midi de Nancy pour une semaine de pêche intensive le jour de la fête nationale. Le feu de ce soir ne serait pas d'artifice mais de bois sec ramassé au bord de l'eau et l'éclat sonore qui le suivrait serait à la fois dans nos cœurs et dans le nœud de sapin qui crépiterait sous le firmament de la liberté !

Nous avions prévu d'arriver à Goumois en fin d'après-midi, de prendre rapidement nos cartes à la Chipotte ou au moulin du Plain et de pêcher jusqu'au coup du soir, tout en cherchant un endroit pour dormir, puis de rester quelques jours à pêcher le Doubs. Sur le trajet, nos voix enjouées clamaient d'habituelles rengaines, parce que nous étions vraiment très heureux d'y être enfin, et aussi parce qu'il n'y avait pas de musique dans la voiture. L'habitacle résonnait donc de plus en plus de nos chants éperdus au fur et à mesure que l'on s'approchait de cette vallée frontière prometteuse.

 

C'est alors que nous avons vu ce qui semblait être une pauvre famille dépitée autour d'une voiture âgée et probablement en panne. Le type nous a fait signe, et malgré la désagréable perspective de rater quelques minutes de pêche, je me suis arrêté pour évaluer l'aide que nous pourrions éventuellement lui apporter.

«  Bonjour Monsieur, vous avez besoin d'aide ? », lui demandais-je.

« Si Missieu, ché la foitour qu'a là bah ‘al marche pli … Aske fous avi un telephoune pour moi telephouner à oune ami ? »

« Ah… la belle affaire, me dis-je ».

« En Suisse » qu'il me dit.

« Bon… prenez mon portable mais rapidos alors, hein ? ».

« Ok ah mirssi bicou missieu mirssi !!! »

Il s'en suivi une (un peu trop longue) conversation en turc ou nous devinâmes à ses éclats de voix soudains que ce cher monsieur n'étaient pas content du tout que sa voiture tombe en panne au milieu de nulle part et qu'il voulait aller à Lyon et que ce serai bien si on venait le chercher etc… ». Lorsqu'il a raccroché, il nous a demandé un peu d'argent. Il faut dire ici que nous avions un budget famélique pour cette semaine de pêche et que le peu d'argent que nous avions était exclusivement réservé à l'achat des cartes et de la nourriture. Après que nous ayons poliment rejeté sa demande, il arracha sa grosse chevalière de son annulaire bourru et nous la tendit en nous implorant de lui prêter 100€. (Mais mon pauvre ami, c'est le budget de nos vacances ! En plus j'suis sûr que c'est du toc…). La détresse de ce pauvre homme coincé sans argent ici avec sa fille, sa femme et sa poubelle en panne faisait de la peine, mais elle commençait à se muer en une forme de rage que nous n'avons voulu ni voir ni entendre, et nous sommes habilement remonté dans la voiture pour foncer enfin vers Goumois, le Doubs et les truites zébrées du coup du soir !

 

Arrivés au village, le bonheur d'y être enfin se transforma en une stupéfaction désolante, une déception aussi brusque qu'inattendue, un profond dépit… Le Doubs était tout simplement impêchable. Ses eaux brunes roulaient sous le pont de la frontière en charriant des masses algueuses arrachées par le débit gonflé dû aux orages malfaisants qui nous avaient précédé. Les mines déconfites, nous sommes tout de même allé nous renseigner à la Chipotte sur l'éventuelle baisse de niveau prochaine mais nous savions au fond de nous que c'était râpé pour le Doubs. « Hé ben ça commence bien ma poule ! » lançais-je à Nico sur un ton ironique teinté d'amertume. Après quelques minutes de réflexions et quelques clopes au bord de ce désespérant spectacle, j'ai eu l'idée d'appeler JB, un pote moucheur de Besançon, pour lui demander conseil. Il me dit alors qu'il était sur le Cusancin et que celui-ci était pêchable. On en aurait pour une demi-heure de route et on aurait encore le temps de pêcher. Roule ma poule, on a décollé de Goumois avec de grands regrets et on est partis pour cette rivière moins connue mais proche et basse. Nous sommes arrivés là bas en toute fin d'après-midi et on s'est arrêté au bord d'un ruisseau que l'on pensait être un bras du Cusancin en plein village, ou de nombreux gobages attirèrent notre attention. J'ai garé la voiture et nous sommes allés voir de nombreuses truites, certaines pas vilaines, se nourrir en surface comme dans un rêve. Trop beau pour être vrai, on a vu le panneau « réserve » assez tard pour y croire…

 

L'achat des cartes de pêche au camping fut une formalité. Comme nous avions prévus de passer deux à trois jours sur le Doubs, nous avons pris la carte du Cusancin pour deux jours (le soir même et le lendemain).

 

Enfin (nom de Dieu !), la voiture était garée, le coin pour camper trouvé entre la rivière et un champ de maïs, et on pouvait monter nos cannes, visser le moulinet, passer la soie dans les anneaux de nos fouets, enfiler nos pantalons de pêche, s'harnacher de nos gilets, accrocher les fils des pointes à nos mouches et ces dernières aux crochets desdits fouets prévus à cet effet. Quelques coups de manivelle, la soie se love dans la bobine, le bas de ligne remonte et se tend doucement… C'est parti !!!!!!!!!!!!

 

La suite dans la prochaine partie, avec plus de photos, plus de rêve, plus de pêche et plus d'aventure !!! 😉

7 commentaires.

  1. tu es un coeur pur François, c'est pour ça que tu t'es arrêté.
    Pour un arnaqueur, 10 de bonne foi, donc ça vallait le coup d'être fixé…
    Sinon j'ai hâte de lire la suite de ton récit, et de voir en grand les qques clichés que tu m'as montré sur ton écran.

  2. Et de la chevallière en or est un grand classique de l'arnaque, je pense que la panne n'était pas réelle non plus…

  3. c 'est toujours un bonheur de te lire! les détails que tu donnes ns permettent vraiment d'imaginer les scènes…le tout avec un ton humoristique..j'attends la suite!!

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